FlashsLES DISPOSITIONS DE LA LOI DE FINANCES POUR 2021 CONCERNANT LES DROITS DE MUTATION À TITRE GRATUIT

La loi de finances pour 2021[1] ne comporte que des dispositions mineures relatives aux droits de mutation à titre gratuit qui se bornent pour l’essentiel à actualiser et clarifier des régimes existants. L’exonération en faveur des successions et dons aux militaires décédés ou blessés en opération ou de leurs proches, tristement actuelle, voit son champ d’application légèrement étendu.

I. LÉGALISATION DE L’EXONÉRATION DE DROITS DE MUTATION À TITRE GRATUIT EN FAVEUR DES ASSOCIATIONS SIMPLEMENT DÉCLARÉES D’ASSISTANCE ET DE BIENFAISANCE

Sans apporter de modifications de fond, l’article 158 de la loi de finances modernise et retouche l’exonération totale de droits de mutation à titre gratuit énoncée par le 4° de l’article 795 du CGI en faveur de certains établissements publics et organismes d’utilité publique.

A défaut d’en modifier effectivement les contours, ces modifications contribuent à clarifier le champ d’application de cette exonération. En ce sens, elles s’inscrivent dans la lignée de l’article 47 de la loi de finances pour 2019 et de l’article 14 de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 visant à clarifier unifier et simplifier le régime fiscal applicable aux organismes sans but lucratif dont les imperfections ont été soulignées en doctrine[2].

 

– D’une part, la nouvelle rédaction légalise la doctrine administrative ayant de longue date étendu cette exonération aux associations simplement déclarées dès lors qu’elles poursuivent un but exclusif d’assistance et de bienfaisance (BOI-ENR-DMTG-10-20-20, 30 juillet 2020, n° 110). Cette exemption totale de droit de donation et de succession qui ne résultait que d’une simple remarque du BOFIP Impôts est dorénavant consacrée par la loi.

– D’autre part, le deuxième alinéa de ce texte qui faisait référence à la décision administrative autorisant l’acceptation de la libéralité pour apprécier le caractère de bienfaisance est supprimé. Cette indication était obsolète, l’article 74 de la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire[3] ayant supprimé cette procédure[4].

– Enfin « organismes » remplacent la « sociétés » pour désigner les structures reconnues d’utilité publique dont les ressources sont affectées à des œuvres d’assistance et de bienfaisance, à la défense de l’environnement naturel ou à la protection des animaux bénéficiant de l’exonération.

 

A défaut de précisions particulières, ces modifications s’appliquent aux dons et legs consentis à compter du 1er janvier 2021.

II. REFORMULATION ET EXTENSION DE L’EXONÉRATION EN FAVEUR DES SUCCESSIONS ET DONS AUX MILITAIRES DÉCÉDÉS OU BLESSÉS EN OPÉRATION OU DE LEURS PROCHES

L’article 43 de la loi actualise et étend indirectement le champ d’application de l’exonération aux droits de succession ou de donation auxquels les décès ou les blessures subies en opération par des militaires peuvent donner lieu.

Le renvoi fait par l’article 796 I 2° bis du CGI aux opérations extérieures ou de sécurité intérieure mentionnées au deuxième alinéa de l’article 4138-3-1 du Code de la défense était devenu obsolète en raison des modifications apportées à ce dernier texte par l’article 1er de l’Ordonnance 2018-1127 du 12 décembre 2018[5].

Cette référence est remplacée par un renvoi aux 2° et 3° de l’article 4138-1-3 précité.

Outre l’actualisation du texte, cette modification permet d’ouvrir le bénéfice de l’exonération non plus aux seules opérations extérieures visées par un arrêté ministériel qui étaient déjà éligibles mais également aux opérations plus vastes définies au 3° de l’article précité, c’est-à-dire celles « mobilisant des capacités militaires, se déroulant sur le territoire national ou hors celui, visant à la défense de la souveraineté et des intérêts de la France, à la préservation de l’intégrité de son territoire national ou à la protection de ressortissants, d’une intensité, d’une dangerosité particulière assimilable à celle d’une opération extérieure ».

Cette extension est destinée à assimiler au regard du bénéfice du régime de faveur ces opérations qui présentent un semblable degré de dangerosité aux « OPEX » afin d’éviter toute rupture d’égalité[6].

Les successions des militaires décédés dans le cadre de ce type d’opérations ou dans les trois années suivant leur fin de blessures reçues ou de maladies contractées durant leur exécution sont totalement exonérées de droits de mutation par décès (CGI, art. 796 I 2° bis).

L’exonération est appliquée à l’appui d’un certificat de l’autorité militaire constatant que la mort a été causée par une blessure reçue ou une maladie contractée durant l’opération considérée (CGI, art. 796 III 1°).

L’extension s’appliquera également par renvoi aux dons en numéraire reçus par les militaires blessés lors de ces opérations ou, en cas de décès, par leurs proches (CGI, art. 796 bis II et III) en vertu d’un texte qui mériterait lui aussi d’être retouché[7].

Aux termes du « II » de l’article 43 de la loi de finances, les nouvelles dispositions s’appliquent aux successions ouvertes à compter du 1er janvier 2021, ce qui conduit à les appliquer également par contre-coup aux dons consentis à compter de la même date.

FRANÇOIS FRULEUX
(CONSULTANT AU CRIDON NORD-EST)

[1] LOI n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021, JO du 30 décembre 2020.

[2] V. spéc. R. VABRES, Organismes sans but lucratif : quelques interrogations fiscales, JCPN n° 19, 13 mai 2016, 1161.

[3] Loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire.

[4] V. également s’agissant de la notion de bienfaisance et des procédures permettant de l’apprécier : Décret n° 2015-832 du 16 juillet 2015, art. 4 et 5 ; art. 6 de la loi du 1er juillet 2001 et art. 111 de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allégement des procédures.

[5] Ord. n° 2018-1127 du 12 décembre 2018 relative au congé du blessé.

[6] Doc. AN n° 138, t. 2, p. 265.

[7] Le III de ce texte mériterait d’être réécrit s’agissant du délai durant lequel le don doit être consenti au militaire blessé. Il précise de manière inadéquate que : « l’exonération prévue aux I et II du présent article est applicable aux dons reçus dans les douze mois suivant l’acte de terrorisme ou, dans les autres situations, le décès ».