1. L’arrêt procède par comparaison de l’article L.145-1 du Code de commerce définissant le champ d’application du statut des baux commerciaux et de l’article L.145-46-1 définissant le champ d’application du droit de préemption. La Cour de cassation relève que le premier de ces articles énonce que le statut des baux commerciaux s’applique aux baux des immeubles ou locaux dans lequel un fonds est exploité, que ce fonds appartienne, soit à un commerçant ou un industriel immatriculé au registre du commerce et des sociétés, soit à un chef d’une entreprise du secteur des métiers et de l’artisanat immatriculé au répertoire des métiers.
En revanche, l’article L145-46-1 du même code dispose que le droit de préemption s’applique lorsque le propriétaire d’un local à usage commercial ou artisanal envisage de vendre celui-ci. Opérant par comparaison des deux textes, et en quelque sorte par soustraction, la Cour de cassation observe que les locaux à usage industriel se trouvent donc exclus du champ d’application du droit de préemption.
La Cour de cassation ajoute, pour conforter son affirmation, que le projet de loi initial prévoyait l’instauration d’un droit de préemption en cas de vente d’un local à usage commercial, industriel ou artisanal, et que ce sont deux amendements parlementaires qui ont exclu les locaux industriels au cours des débats. L’intention du législateur d’exclure les locaux industriels est donc absolument certaine.
2. Le second apport de l’arrêt concerne la définition d’un local à usage industriel. La Cour de cassation relève qu’elle n’a pas, à ce jour, rendu de décision portant sur cette définition. Elle observe qu’en revanche le Conseil d’État, statuant en matière fiscale, a jugé qu’ont un caractère industriel les entreprises exerçant une activité qui concourt directement à la fabrication ou à la transformation de biens corporels mobiliers et pour lesquels le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre est prépondérant (CE, 28 février 2007, n° 283441 ; CE, 13 juin 2016, n° 380490 ; CE, 3 juillet 2015, n° 369851).
La Cour de cassation s’approprie les critères dégagés par le Conseil d’État, observant qu’ils sont opérants au regard de l’article L.145-46-1 pour déterminer la portée de l’exclusion des locaux à usage industriel du droit de préemption. En l’espèce, les locaux loués étaient principalement destinés à un usage de fabrication d’agglomérés. L’extrait du RCS de la locataire mentionnait des activités de « préfabrication de tous éléments de construction à base de terre cuite, planchers, murs et autres », ainsi que de « fabrication de hourdis, blocs et pavés béton ». L’activité de négoce exercée sur le site n’était qu’accessoire. Il s’agissait donc bien d’un site abritant des locaux industriels.
Bernard-Henri DUMORTIER
(CONSULTANT ASSOCIÉ AU CRIDON NORD-EST)