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Tentaculaire et riche d’enseignements, cette loi appelle à l’évidence des commentaires et des formations que le CRIDON Nord-Est ne manquera pas de proposer à ses clients. Toutefois, la nouvelle disposition qu’il nous paraît très utile de communiquer d’urgence, car elle s’applique dès le 25 mars 2019, concerne la procédure de changement de régime matrimonial.

Dans un titre II, destiné à « simplifier la procédure civile et administrative », l’article 8 de la loi modifie la rédaction du texte-clé qu’est l’article 1397 du code civil.

1.] LE NOUVEL ARTICLE 1397 c. civ.

Les époux peuvent convenir, dans l’intérêt de la famille, de modifier leur régime matrimonial, ou même d’en changer entièrement, par un acte notarié. A peine de nullité, l’acte notarié contient la liquidation du régime matrimonial modifié si elle est nécessaire.
Les personnes qui avaient été parties dans le contrat modifié et les enfants majeurs de chaque époux sont informés personnellement de la modification envisagée. Chacun d’eux peut s’opposer à la modification dans le délai de trois mois. En cas d’enfant mineur sous tutelle ou d’enfant majeur faisant l’objet d’une mesure de protection juridique, l’information est délivrée à son représentant, qui agit sans autorisation préalable du conseil de famille ou du juge des tutelles.
Les créanciers sont informés de la modification envisagée par la publication d’un avis dans un journal habilité à recevoir les annonces légales dans l’arrondissement ou le département du domicile des époux. Chacun d’eux peut s’opposer à la modification dans les trois mois suivant la publication.
En cas d’opposition, l’acte notarié est soumis à l’homologation du tribunal du domicile des époux. La demande et la décision d’homologation sont publiées dans les conditions et sous les sanctions prévues au code de procédure civile.
Lorsque l’un ou l’autre des époux a des enfants mineurs, sous le régime de l’administration légale, le notaire peut saisir le juge des tutelles dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 387-3… »

La suite de l’article 1397 est inchangée.

2.] BRÈVES OBSERVATIONS

La première nouveauté était de longue date préconisée. Désormais, lorsque des époux souhaitent modifier leur régime matrimonial, ils ne sont plus obligés d’attendre que celui-ci se soit appliqué pendant deux ans. Ce délai est supprimé (Cf : art.1397, al.1er).


Le deuxième alinéa de l’art.1397 apporte une louable précision qui concerne les enfants mineurs sous tutelle et les enfants majeurs bénéficiant d’une mesure de protection juridique.
Certes, la circulaire du Garde des sceaux, en date du 29 mai 2007, précise que « lorsqu’un enfant majeur fait l’objet d’une mesure de tutelle ou de curatelle, cette information est adressée, selon les règles de droit commun applicables aux mesures de protection, selon le cas soit au tuteur, soit conjointement au majeur protégé et à son curateur » (p. 62). Cependant, en pratique, de nombreux notaires s’interrogeaient tout de même sur la nécessité de saisir préalablement le juge des tutelles. Désormais la réponse est inscrite dans la loi : selon que l’enfant est mineur ou majeur, point n’est besoin d’une autorisation préalable du conseil de famille ou du juge des tutelles.

 

Enfin, lorsque l’un ou l’autre époux a des enfants mineurs, l’acte notarié n’est plus soumis à l’homologation judiciaire du JAF ! Toutefois, sous le régime de l’administration légale, le notaire « peut » saisir le juge des tutelles s’il lui semble que l’acte de changement de régime peut compromettre « manifestement et substantiellement les intérêts patrimoniaux du mineur » (C. civ., art.387-3, al.2). Autrement dit, en présence d’enfants mineurs, l’homologation judiciaire de l’acte notarié par le JAF est supprimée, mais le notaire pourra solliciter l’autorisation préalable du juge des tutelles lorsque le changement de régime souhaité par ses clients lui semblera porter une atteinte substantielle aux intérêts patrimoniaux des enfants mineurs. Cette mesure de simplification ne risque-t-elle pas (exceptionnellement) de placer le notaire dans des situations délicates ?

JOËLLE VASSAUX
(CONSULTANTE ASSOCIÉE AU CRIDON NORD-EST
& PROFESSEUR À L’UNIVERSITÉ D’ARTOIS
)

DAVID BOULANGER
(DIRECTEUR DU CRIDON NORD-EST)

© FLASH n°2/2019 – 25 mars 2019