Actu professionnelleCOVID-19 – RUPTURE CONVENTIONNELLE DES CONTRATS DE TRAVAIL
AVERTISSEMENT :
Mise à jour suite au décret n° 2020-471 du 24 avril 2020 portant dérogation au principe de suspension des délais pendant la période d’état d’urgence sanitaire liée à l’épidémie de covid-19 dans le domaine du travail et de l’emploi (JO 25 avril).

QUELLE EST L’INCIDENCE DE L’ACTUELLE PÉRIODE JURIDIQUEMENT PROTÉGÉE SUR LES RUPTURES CONVENTIONNELLES DES CONTRATS DE TRAVAIL ?

La rupture conventionnelle d’un contrat de travail relève des articles L. 1237-11 et suivants du code du travail.

Globalement, dans la perspective d’une rupture conventionnelle, l’employeur et le salarié doivent se réunir à l’occasion d’au moins un entretien. La situation actuelle d’urgence sanitaire est susceptible de rendre délicate la réalisation de cet entretien.

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COMMENT ORGANISER LE OU LES ENTRETIENS ?

En matière de licenciements, la Cour de cassation a considéré qu’une conversation téléphonique ne saurait remplacer l’entretien préalable (Soc., 14 nov. 1991, n° 90-44195). Elle ne s’est toutefois, semble-t-il, jamais prononcée sur la validité de l’entretien préalable organisé par visioconférence (admis par Rennes : 11 mai 2016, n° 14/08483). En toute hypothèse, cette modalité ne pourrait être envisagée que de l’accord exprès des parties.

COMMENT ORGANISER LA SIGNATURE DE LA CONVENTION DE RUPTURE ET DU DROIT DE RÉTRACTATION ?

Ensuite, l’employeur doit remettre, dans les conditions prévues par le Code du travail (Cf. art. L. 1237-13, code du travail), un exemplaire de la convention de rupture au salarié. Une fois la convention de rupture signée, s’ouvre une faculté de rétractation dans un délai de 15 jours calendaires à compter de la signature. Cette rétractation doit se faire par lettre recommandée avec avis de réception ou lettre remise en mains propres contre récépissé.

De l’accord exprès des parties, nous estimons que les échanges pourraient être réalisés acte sous signature privée électronique et par lettre recommandée électronique, certifiés eIDAS.

Dans sa version initiale, on pouvait penser que l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 était applicable à ce droit de rétractation, donc qu’aucune rupture conventionnelle n’aurait même pu prendre effet avant le 24 juin 2020. Toutefois, l’ordonnance n° 2020-427 du 15 avril 2020 a modifié l’article 2 précité, en déclarant la modification interprétative. En résulte que le délai de rétractation est rétroactivement exclu du champ de l’ordonnance n° 2020-306.

COMMENT OPÉRER LA DEMANDE D’HOMOLOGATION À LA DIRECCTE ?

Ensuite, en l’absence de rétractation effective pendant le délai, l’employeur adresse une demande d’homologation à la Direccte et, à compter de la réception du courrier, l’Administration dispose d’un délai de 15 jours ouvrables pour se prononcer. A défaut de réponse à l’issue du délai de 15 jours ouvrables, l’homologation est réputée acquise.

Compte tenu de la situation actuelle, il convient de procéder par télétransmission de la demande d’homologation de la rupture conventionnelle (www.telerc.travail.gouv.fr).

PEUT-ON AVOIR UNE DÉCISION IMPLICITE ?

L’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 a prorogé temporairement les délais dont dispose l’Administration pour rendre une décision, y compris implicite. C’est-à-dire que, pendant la période d’urgence sanitaire, donc entre le 12 mars et le 24 juin, sous réserve d’allongement par la loi de cette période spéciale, les délais qui ont commencé à courir avant le 12 mars 2020 et qui auraient dû expirer pendant la période d’urgence sanitaire sont suspendus ; ils recommenceront à courir, pour le temps restant, à compter du 25 juin 2020. Les délais qui auraient dû commencer à courir pendant la période d’urgence sanitaire, voient leur point de départ reporté à l’issue de la période spéciale, soit, en l’état actuel du droit positif, au 25 juin 2020 (art. 7). On en déduisait une interdiction de toute homologation tacite, au bout d’un délai de 15 jours, d’une rupture conventionnelle en vertu de l’article L.1237–14 du Code du travail. Naturellement, la Direccte peut toujours expressément homologuer la convention de rupture conventionnelle, mais on sait que, en pratique, l’hypothèse n’est, peut-être, pas habituelle.

Néanmoins, l’ordonnance n° 2020-306 a été également modifiée sur ce point par l’ordonnance n° 2020-427 du 15 avril 2020, laquelle prévoit la possibilité d’écarter par décret la règle de suspension temporaire des délais encadrant certaines décisions administratives (art. 9). Le décret n° 2020-471 du 24 avril 2020 portant dérogation au principe de suspension des délais pendant la période d’état d’urgence sanitaire liée à l’épidémie de covid-19 dans le domaine du travail et de l’emploi (JO 25 avril) rend la modification effective.

Ce décret dresse la liste des catégories d’actes, de procédures et d’obligations, prévus par le code du travail, pour lesquels, par dérogation aux règles ci-dessus rappelées, les délais reprennent leur cours à compter du lendemain du jour de sa publication (voir). Les dérogations sont fondées sur des motifs de sécurité, de protection de la santé, de sauvegarde de l’emploi et de l’activité, ainsi que sur les motifs de sauvegarde de l’emploi et de l’activité et de sécurisation des relations de travail et de la négociation collective (art. 1er). Dans l’annexe au décret, fixant la liste des catégories d’actes, de procédures et d’obligations concernés, on trouve notamment l’homologation de la rupture conventionnelle (art. L. 1237-14, code du travail).

DAVID BOULANGER
(DIRECTEUR GÉNÉRAL DU CRIDON NORD-EST)