Actu professionnelleCOPROPRIÉTÉ ET COVID-19 : « SEPT MOTS SUR ORDONNANCE »
Le titre précité, emprunté au film de Jacques Rouffio (1), permet de rendre compte des nouveautés contenues dans l’article 1er de la l’ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020 portant diverses mesures prises pour faire face à l’épidémie de covid-19 (JO 23 avril 2020). Cet unique article de l’ordonnance portant sur le droit de la copropriété apporte des solutions aux questions restées dans réponse dans l’ordonnance précédente (n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété – JO 26 mars 2020).

DEUX MOIS

 

On rappelle que l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 n’avait pas vocation à régir les contrats de syndic donc le mandat arriverait à terme plus d’un moins après l’expiration de l’état d’urgence sanitaire (23 juin 2020, à minuit). Or, l’on s’accordait à penser que la plupart des assemblées générales appelées à se réunir pendant la période de confinement, soit au cours du 2e trimestre 2020, auraient à statuer sur des mandats arrivant à échéance le 30 juin 2020. De la sorte, dans ce cas précis, l’assemblée générale aurait dû avoir lieu entre le 24 mai et le 30 juin (!), ce qui demeurait finalement impossible à réaliser, autant d’un point de vue temporel que matériel.

 

Tenant compte de ces difficultés, l’article 22 de l’ordonnance n° 2020-304 énonce désormais  que « Par dérogation aux dispositions de l’article 1102 et du deuxième alinéa de l’article 1214 du code civil et de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, le contrat de syndic qui expire ou a expiré « entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la date de la cessation de l’état d’urgence sanitaire mentionné à l’article 1er » est renouvelé dans les mêmes termes (…) ». On constate ainsi que la date d’expiration du contrat de syndic est maintenant fixée au 23 juillet 2020..

HUIT MOIS

Par voie de conséquence, la période d’approbation du nouveau contrat de syndic, initialement de six mois, est elle-même augmentée. L’article 22 précité, et modifié, ajoute que le contrat de syndic est renouvelé dans les mêmes termes « jusqu’à la prise d’effet du nouveau contrat du syndic désigné par la prochaine assemblée générale des copropriétaires. Cette prise d’effet intervient, au plus tard huit mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire mentionné à l’article 1er », ce qui conduit au 23 janvier 2021.

RÉMUNÉRATION

Le « renouvellement » du contrat de syndic « dans les mêmes termes » édicté par l’ordonnance n° 2020-304 avait également suscité des interrogations quant au montant des honoraires du syndic. Si l’on estimait que la rémunération du syndic ne devait subir aune modification (sauf révision prévue par un contrat en cours), la question était de savoir sur quelle base devait être calculé le nouveau forfait du syndic. Par principe, le forfait du contrat renouvelé aurait dû être le même que celui perçu pour l’entier exercice 2019-2020 (le forfait n’est pas calculé par mois, mais pour la durée du contrat, définie de date à date).
Un 2ème alinéa a été ajouté à l’article 22, pour contrarier la solution de principe, en édictant que « La rémunération forfaitaire du syndic est déterminée selon les termes du contrat qui expire ou a expiré, au prorata de la durée de son renouvellement dans les conditions définies à l’alinéa précédent ».

CONSEIL SYNDICAL

L’ordonnance n° 2020-304 n’avait pas mentionné le renouvellement des mandats des conseillers syndicaux alors que leur « maintien aurait été indispensable au contrôle de la bonne gestion du syndic au sein des copropriétés ainsi que pour l’organisation des assemblées générales des copropriétaires » (Rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance du 22 avril 2020). Cet « oubli » a été corrigé et le renouvellement du mandat des conseillers syndicaux est calqué sur celui du syndic.

Selon le nouvel article 22-1 de l’ordonnance n° 2020-304, « Par dérogation aux dispositions de l’article 21 et du c de l’article 25 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, le mandat confié par décision de l’assemblée générale aux membres du conseil syndical, qui expire ou a expiré entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la date de la cessation de l’état d’urgence sanitaire mentionné à l’article 1er, est renouvelé jusqu’à la tenue de la prochaine assemblée générale des copropriétaires. Cette assemblée générale intervient au plus tard huit mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire mentionné à l’article 1er. Les dispositions du précédent alinéa ne sont pas applicables lorsque l’assemblée générale des copropriétaires a désigné les membres du conseil syndical avant la publication de la présente ordonnance ».

COPROPRIÉTÉ ET COVID-19 : « SEPT MOTS SUR ORDONNANCE ».
Enfin, dans un tel climat d’incertitude, il reste à s’interroger quant à l’application au 1er juin 2020 de la réforme du droit de la copropriété issue de l’ordonnance n°2019-1101 du 30 octobre 2019…

THIERRY DUBAELE
(CONSULTANT ASSOCIÉ AU CRIDON NORD-EST)

(1) : « Sept morts sur ordonnance », 1975, avec pour acteurs principaux Michel Piccoli, Gérard Depardieu, Charles Vanel et Jane Birkin