Actu JuridiquePROMESSE DE VENTE : RAPPEL SUR LA CADUCITÉ OPÉRANT DE PLEIN DROIT EN CAS DE NON RÉALISATION D’UNE CONDITION SUSPENSIVE ASSORTIE D’UN DÉLAI À LA DATE PRÉVUE POUR LA RÉITÉRATION AUTHENTIQUE DE LA VENTE

PROMESSE DE VENTE : RAPPEL SUR LA CADUCITÉ OPÉRANT DE PLEIN DROIT EN CAS DE NON RÉALISATION D’UNE CONDITION SUSPENSIVE ASSORTIE D’UN DÉLAI À LA DATE PRÉVUE POUR LA RÉITÉRATION AUTHENTIQUE DE LA VENTE

Cass. civ. 3e, 4 février 2021, n° 20-15913.

En matière de vente d’immeuble, l’articulation entre les stipulations contractuelles et la protection d’ordre public entourant l’acquéreur emprunteur est sujette à de nombreux contentieux, particulièrement lorsqu’il s’agit de déterminer le sort de l’avant-contrat en cas de dépassement du délai prévu pour la réalisation de la condition suspensive légale d’obtention de prêt. (Article L313-41du Code de la consommation ; v. notamment sur cette question JCPI, n°47, 23 Novembre 2018, 1345, Mekki à propos de Cass.civ.3ème, 12 juill. 2018, n° 17-22.171 ; La réforme du droit des obligations, Chantepie G. et Latina M., 2016, Dalloz, nos 778 et s. ; L’essentiel Droit des contrats – n°11 – page 3, 5/12/2016, par M. Latina.)

 

En effet, la condition suspensive d’obtention de prêt étant une règle d’ordre public, elle est réputée stipulée dans l’intérêt exclusif de l’acquéreur, qui serait alors – selon une jurisprudence réaffirmée à plusieurs reprises par la Cour de cassation – le seul à pouvoir se prévaloir de la défaillance de la condition et, corrélativement, le seul à pouvoir invoquer la caducité de l’avant-contrat en cas de non réalisation de la condition suspensive dans le délai imparti (Cass. civ. 3ème, 27 octobre 2016, n° 15-23.727 ; Cass. civ. 3ème, 8 juillet 2014, n° 13.17-836 ; Cass. civ.3ème, 12 janvier 2010, n° 08.18-624).

 

Bien que certains auteurs soutiennent que cette jurisprudence ne survivra pas à l’ordonnance du 10 février 2016 (v. notamment, « Les promesses de vente et d’achat immobilières » par J. Piédelièvre et S. Piédelièvre, 2018, Défrénois, Editions Lextenso, n°293 ; « Heurs et malheurs d’une condition suspensive de pratique courante : plaidoyer pour un retour à une lecture rigoureuse de la loi » , par C.Brenac et M.Thioye , AJDI 2019, p.614) – ayant introduit l’article 1304-4 du Code civil lequel dispose que la renonciation à la condition suspensive stipulée dans l’intérêt exclusif de l’une partie est possible tant que celle-ci n’est pas accomplie ou n’a pas défailli–  on peut continuer de retenir la solution déduite de la jurisprudence antérieure tant que la Cour de cassation n’aura pas statué en sens inverse.

 

En effet, jusqu’à présent, une jurisprudence constante (Cass. civ. 3, 29 mai 2013 n° 12-17077.  Cass. civ. 3, 9 mars 2017 n° 15- 26182) décide que dès lors que, dans une promesse synallagmatique de vente, la réalisation d’une condition suspensive est enfermée dans un délai et qu’à la date prévue pour la réitération authentique de la vente, cette condition n’est pas réalisée, alors la promesse est caduque de plein droit. C’est d’ailleurs ce que la Cour de cassation vient encore de rappeler à l’occasion dans un arrêt du 4 février 2021 : [La Cour d’appel] « en a déduit à bon droit, sans dénaturation des termes de la promesse de vente et sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que l’obtention d’un prêt postérieurement à la date fixée pour la signature de l’acte authentique était sans incidence sur la caducité de la promesse, celle-ci pouvant, à partir de cette date, être invoquée par les deux parties ». Même si l’affaire relevait du droit ancien et qu’il s’agit d’un arrêt d’espèce, la Cour de cassation n’a d’aucune manière laissé entendre qu’elle reviendrait sur cette analyse classique, que le Code civil même modifiée n’exclut pas littéralement, nonobstant les opinions de certains auteurs (J. Piédelièvre et S. Piédelièvre ,Défrénois 2018 ; C.Brenac M.Thioye – AJDI 2019, p.614 précit.).

 

Ainsi, une fois la date de réitération authentique passée sans que l’acquéreur n’ait justifié de l’obtention ou du refus de son prêt, la promesse de vente sera de plein droit, caduque et chacune des parties reprendra sa pleine liberté. En pratique, il sera toutefois conseillé au vendeur d’adresser à l’acquéreur un courrier constatant (et rien d’autre) la caducité de la promesse préalablement à la remise en vente de son bien. Si les parties à l’avant-contrat entendent que le dépassement de la date de réitération authentique de la vente n’emporte pas, dans ce cas, caducité du contrat préparatoire, il convient qu’elles le prévoient expressément dans celui-ci.

 

CONDITION SUSPENSIVE D'OBTENTION DE PRÊT

JULIETTE ROUSSEL
(CONSULTANTE AU CRIDON NORD-EST)